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Crédit ©Hyejin Kang/Adobe stock
Cet article reprend en synthèse les principaux enseignements de l'étude publiée dans le numéro 39 de Questions politiques sociales – Les études. Celle-ci établit une comparaison entre l’espérance de vie des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers et celle de l’ensemble de la population française, mesurée entre 2015 et 2019.
La connaissance de la mortalité des affiliés à un régime de retraite constitue une information centrale pour mieux anticiper ses engagements financiers. Elle représente en effet un déterminant important des évolutions démographiques du régime et, de ce fait, de la trajectoire future des dépenses de prestations. Au-delà du seul pilotage financier des régimes, la bonne connaissance de l’espérance de vie de la population des affiliés, ou de sous-populations d’affiliés, est également un indicateur permettant de guider la mise en place de politiques de prévention. Ainsi, une mortalité plus précoce des personnes dans tel ou tel secteur d’activité peut constituer une alerte quant à l’existence de risques spécifiques en termes de santé au travail.
Les différences d’espérance de vie trouvent leur source dans une grande variété de facteurs, au-delà de la simple hétérogénéité des dotations naturelles d’un individu à l’autre. L’espérance de vie est évidemment diminuée par les comportements individuels à risque (tabagisme, alcoolisme, obésité…) mais obéit aussi à des déterminants économiques et sociaux : niveau de formation, activité professionnelle, conditions de travail (travail de nuit, cycles horaires changeants…), conditions de fin de carrière, environnement…
La présente étude propose une évaluation de l’espérance de vie des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) sur la base de la comparaison entre la mortalité observée pour cette catégorie entre 2015 et 2019 et celle de l’ensemble de la population française sur la même période. Ainsi, en 2017, l’espérance de vie à 65 ans s’élève à 23 ans et 4 mois pour les femmes fonctionnaires territoriales ou hospitalières – soit 2 mois de plus que celle de l’ensemble des femmes de la population française – et à 18 ans et 9 mois pour leurs homologues masculins – soit 6 mois de moins que celle de l’ensemble des hommes de la population française.
Parmi ces fonctionnaires territoriaux et hospitaliers, les bénéficiaires d’une pension d’invalidité ont une espérance de vie à 65 ans nettement plus réduite que celle des non invalides : de 3 ans et 8 mois pour les femmes, de 4 ans et 10 mois pour les hommes. En revanche, le fait d’avoir exercé des emplois de catégorie active n’apparaît guère discriminant : chez les hommes comme chez les femmes, l’espérance de vie à 65 ans des fonctionnaires positionnés sur des emplois de catégorie active est très similaire à celle des sédentaires.
Par contre, l’espérance de vie des fonctionnaires augmente avec le niveau de qualification. Les fonctionnaires relevant de la catégorie hiérarchique A ont une espérance de vie à 65 ans supérieure de 8 mois (pour les femmes) et de 11 mois (pour les hommes) aux fonctionnaires relevant de la catégorie hiérarchique B, qui eux-mêmes ont une espérance de vie supérieure à celle des agents de catégorie hiérarchique C (de 9 mois pour les femmes et de 2 ans et 1 mois pour les hommes).
L’espérance de vie à 65 ans des hommes de catégorie C de la fonction publique territoriale et hospitalière est également inférieure d’1 an et 2 mois à celle de l’ensemble des hommes de la population française. Ce dernier résultat explique en grande partie l’espérance de vie relativement faible de l’ensemble des hommes de la fonction publique territoriale et hospitalière, dont 72 % relèvent de la catégorie C (graphique 1).
Un coup de projecteur sur les principaux corps et cadres d’emploi met en évidence l’espérance de vie à 65 ans particulièrement faible des adjoints techniques territoriaux qui représentent 37 % des hommes fonctionnaires territoriaux et hospitaliers : elle est de presque 2 ans inférieure à celle de l’ensemble de la population masculine.
A contrario, l’espérance de vie des femmes adjointes techniques territoriales est très similaire à celle de l’ensemble de la population féminine avec un écart de seulement 3 mois. Les femmes relevant des corps d’aides-soignants et auxiliaires de puériculture (15 % des femmes) et des infirmières de soins généraux et spécialisés (12 % des femmes) bénéficient quant à elles d’une espérance de vie légèrement supérieure à l’ensemble de la population féminine (resp. de +2 mois et de +4 mois), bien qu’elles exercent des emplois identifiés comme présentant « un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles » et bénéficient, ou ont pu bénéficier, à ce titre, sous réserve de certaines conditions, d’une possibilité de départ anticipé en retraite au titre de la « catégorie active » (graphique 2).
Vous pouvez retrouver l’étude complète réalisée par Marion Bulcourt, Aurélie Lemonnier et Laurent Soulat sur « l’espérance de vie des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers : un regard sur des emplois spécifiques » dans Questions Politiques Sociales – Les études n°39, ainsi que les données des graphiques et tableaux sur le site https://politiques-sociales.caissedesdepots.fr/ à la rubrique Publications et statistiques. Y sont disponibles l’ensemble des publications de la direction des politiques sociales de la Caisse des Dépôts. QPS – Les études a vocation à faire connaître les résultats des travaux d’études dans l’ensemble des domaines de la protection sociale (retraite, vieillissement, handicap…) et de la formation professionnelle. La collection est complétée par QPS – Les cahiers, qui est une série de documents de travail diffusant des études approfondies, et QPS – Les brèves, qui propose des éclairages statistiques.