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En 2021, le Compte personnel de formation (CPF) a permis de financer totalement ou partiellement un total de 2,79 Md€ d’actions de formation, correspondant à 122,1 millions d’heures de formation. En termes de dépense, les « langues vivantes », le « permis B » et « l’accompagnement à la création ou à la reprise d’entreprise » (ACRE) arrivent en tête des types de formation choisis (tableau 1). Pour autant les durées de formations varient beaucoup d’un type de formation à l’autre de sorte que, si l’on raisonne cette fois en termes d’heures de formation financées, un tout autre palmarès s’impose : ce sont les formations dans les domaines du « secrétariat et de la bureautique », du « travail social », des « transports (hors permis B), de la manutention et du magasinage » qui représentent les plus gros volumes horaires.
Une analyse approfondie par grands groupes de spécialités met en évidence la grande hétérogénéité des formations suivies que ce soit en termes de durée, de prix horaire ou d’importance du recours au distanciel pour la réalisation des formations. Dans les groupes de spécialités des « langues vivantes », des « ACRE », du « secrétariat et de la bureautique », ainsi que des « systèmes d’information », les formations dispensées intégralement en distanciel représentent ainsi plus des trois quarts de la dépense, contre seulement 10 % pour les formations au permis B (graphique 3).
Le marché de la formation professionnelle financée par le CPF est en outre marqué par un renouvellement très rapide des caractéristiques des offres souscrites : en 2022, 65 % de la dépense de formation financée par le CPF se porte ainsi sur des offres qui n’ont fait l’objet d’aucune transaction en 2021. Mais, là encore, les disparités entre groupes de spécialités sont massives : le taux de renouvellement des offres en 2022 avoisine 90 % pour les « langues vivantes », le « secrétariat et la bureautique », ainsi que les « systèmes d’information », alors qu’il n’excède pas 20 % pour les formations au « permis B » (graphique 5).
Surtout, on constate qu’entre 2020 et 2022, la hausse du nombre d’heures de formation financées est bien inférieure à celle de la dépense correspondante, si bien que le prix horaire moyen apparent des formations souscrites augmente de 63,5 % en seulement deux ans. Cette hausse très forte, sans commune mesure avec la hausse de l’indice des prix à la consommation (IPC) publié par l’Insee sur la même période (+6,9 %), interroge évidemment. Le chiffre de 63,5 % ne correspond en effet pas à une mesure de l’évolution des prix stricto sensu dans la mesure où il ne traduit pas l’évolution de prix de formations à caractéristiques inchangées entre 2020 et 2022 : une partie importante peut provenir de modifications de la structure de la consommation qui se déporterait vers des certifications aux prix horaires structurellement plus élevés, ou bien de modifications substantielles apportées à leur catalogue par les organismes de formation.
L’analyse de l’évolution des prix des formations à caractéristiques inchangées (à savoir l’intitulé de la certification, la raison sociale de l’organisme de formation, les modalités de réalisation et la durée de la formation) confirme cette intuition : le prix des formations à caractéristiques inchangées n’augmente que de +7,7 % en deux ans. La très forte croissance du prix horaire moyen apparent des formations entre 2020 et 2022 semble par conséquent d’abord attribuable aux modifications des caractéristiques des formations souscrites, et tout particulièrement au choix de nombreux organismes de formation de diminuer la durée des formations proposées sans répercuter intégralement cette baisse sur les prix des formations, ce qui a généré mécaniquement une hausse du prix horaire moyen apparent.
Cette stratégie semble avoir très inégalement affecté les différents groupes de spécialités : elle est beaucoup moins répandue dans les formations des transports (dont le permis B), qui préparent à des examens standardisés et réglementés pour lesquels il est difficile de réduire fortement la durée des formations sans compromettre les chances de réussite des stagiaires à l’examen. Elle semble en revanche avoir été très répandue dans des groupes de spécialités comme ceux des « langues vivantes », de « l’accompagnement à la création ou à la reprise d’entreprise », ou au « secrétariat et à la bureautique ». Cette pratique aurait pu se heurter aux réticences des acheteurs à souscrire des formations beaucoup plus courtes pour des prix à peu près inchangés. Cela n’a semble-t-il pas été le cas, probablement parce que l’augmentation des prix horaires a pu paraître indolore aux titulaires de comptes CPF, dès lors qu’il leur était toujours possible de financer l’intégralité du coût de ces formations avec les seules sommes disponibles sur leur CPF, sans devoir en payer une partie sur leurs propres deniers.
Vous pouvez retrouver l’étude complète réalisée par Ronan Mahieu « l’évolution des prix des formations financées par le CPF entre 2020 et 2022 » dans Questions Politiques Sociales – Les études n°41, ainsi que les données des graphiques et tableaux sur le site https://politiques-sociales.caissedesdepots.fr/ à la rubrique Publications et statistiques. Y sont disponibles l’ensemble des publications de la direction des politiques sociales de la Caisse des Dépôts. QPS – Les études a vocation à faire connaître les résultats des travaux d’études dans l’ensemble des domaines de la protection sociale (retraite, vieillissement, handicap…) et de la formation professionnelle. La collection est complétée par QPS – Les cahiers, qui est une série de documents de travail diffusant des études approfondies, et QPS – Les brèves, qui propose des éclairages statistiques.