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Les infrastructures numériques offrent de grandes chances de développement à tous les territoires, ruraux comme urbains, dès lors que les services qu’elles permettent de déployer sont au service de l’intérêt général et qu’ils maintiennent la valeur créée dans le territoire. La prégnance des schémas entrepreneuriaux inspirés des succès de la Silicon Valley, impliquant une forte concentration de la valeur, a des impacts tels sur ses parties prenantes qu’ils rendent indispensable un modèle d’innovation alternatif, au service de la collaboration locale et qui donne un rôle actif aux collectivités territoriales : les plateformes coopératives.
L’émergence des plateformes collaboratives et de l’économie du partage a suscité un formidable espoir de renouveau social et économique : l’utilisation nouvelle des technologies de réseau, accessibles à tout moment, permet la création d’organisations horizontales permettant l’échange et la production directs entre individus, tout en réduisant le rôle des intermédiaires ; les communautés peuvent s’organiser et inventer de nouveaux rapports au travail, créer de nouvelles relations sur un territoire, développer l’usage plutôt que la possession, améliorer le cycle de vie des objets, inventer de nouveaux modes de consommation et de financement, intégrer une véritable approche écologique dans leurs nouvelles pratiques, développer des formes d’économie circulaire…
Elles ont aussi suscité l’émergence de questionnements sur les conséquences sociales, éthiques, démocratiques, d’une reconfiguration des activités humaines autour de la récolte et l’exploitation de quantités extraordinaires de données. Mais la mise en œuvre de dispositifs numériques dans les territoires ne laisse que peu de place aux acteurs et aux usagers.
Rassemblées derrière le concept de smart city, les solutions destinées à transformer l’aménagement territorial sont peu appropriées par les citoyens. Par ailleurs, les usages numériques de notre quotidien sont majoritairement facilités par des entreprises géantes rarement françaises, dont l’éthique et les impacts sur les territoires posent question : captation et monétisation des données, contournement du droit du travail, impact avéré sur les choix démocratiques, gentrification subie, etc.
Pour répondre à ce double enjeu, de nouveaux outils émergent. Au carrefour du coopérativisme, de l’économie sociale et solidaire, de la promotion des communs et de la défense des principes démocratiques, les outils d’un numérique libre, ouvert et à la recherche de l’intérêt général, que constituent les plateformes coopératives, sont à la disposition des citoyens et des acteurs économiques qui souhaitent mettre en place des solutions numériques ancrées dans les besoins de leurs territoires.
Ces plateformes préfigurent un mode d’entrepreneuriat numérique d’un nouveau type : collectif puisqu’il embarque de nombreuses parties prenantes, social car il privilégie la pérennité de la collaboration entre ses membres à la rentabilité de court terme, territorial avec l’objectif de garder autant que faire se peut la valeur localement.
Alors que leurs modèles suscitent de l’intérêt, notamment des collectivités territoriales qui souhaitent s’appuyer sur les acteurs de leur territoire et augmenter leur impact par des outils qui correspondent à leurs usages et à leurs besoins, ces projets ont de grandes difficultés à trouver les soutiens nécessaires à leur développement. Les formes juridiques adoptées, l’originalité des licences utilisées, les modalités de régulation à l’œuvre, l’innovation apportée en matière de modèles économiques, constituent autant d’obstacles aux approches classiques des investisseurs et des acheteurs, publics ou privés.
Les plateformes coopératives apparaissent pourtant comme l’opportunité de mettre en place des infrastructures de coopération efficaces, au service des collaborations entre acteurs et dans les territoires.
Ce cahier de recherche expose la singularité des plateformes coopératives, en documentant le modèle et les services rendus par plusieurs plateformes membres du réseau Plateformes en communs, animé par l’association La Coop des Communs.