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A la suite de la crise économique majeure que traverse l’Europe, la Commission européenne a proposé un budget ambitieux, plus de 1000Md€ sur 7 ans, auquel s’ajoute un plan de relance, « Next Generation EU », de 750Md€ sur trois ans. Mais comment ces sommes astronomiques, âprement débattues par les représentants des Etats européens au cours de l’été, vont-elles irriguer l’économie européenne ? Quel(s) circuit(s) emprunteront ces liquidités pour financer entreprises et projets sur le territoire ? C’est à une petite promenade dans le jardin européen que nous vous invitons ici.

Gestion directe : la grosse tuyauterie

La circuiterie des fonds européens obéit à un principe simple : orienter les fonds vers les projets et les entreprises qui en ont besoin et qui contribuent au développement durable et harmonieux de l’Europe. Mais si l’Union européenne définit des objectifs et de grandes politiques pour les atteindre, en pratique comment atteindre tel projet ou telle entreprise qui contribue sur le terrain à l’atteinte de ces objectifs ?

La Commission peut l’atteindre elle-même, directement, en sa qualité de garante de l’intérêt communautaire. Et, effectivement, la Commission gère de manière directe certaines politiques et, à ce titre, alloue les fonds qui leur sont associés aux entreprises et projets, généralement d’envergure européenne, qui contribuent à l’atteinte des objectifs de ces politiques. C’est le cas, par exemple, du programme Horizon Europe (H2020 précédemment) qui a vocation à financer les grands projets de recherche dont les retombées bénéficieront à l’ensemble de l’Europe. Ces grands projets, par nature européens, se trouvent évidemment sur différents territoires : c’est alors tel laboratoire ou tel centre de recherche dans telle technopole qui, après avoir répondu à un appel à projets de la Commission, pourra bénéficier de la manne européenne. Dans la circuiterie que nous explorons, il s’agit donc des gros tuyaux, destinés aux plus gros projets et entités.

 

Gestion indirecte : les circuits secondaires

Mais ces tuyaux ne sont évidemment pas adaptés à tous les types de projets (notamment pas aux projets de plus petite taille) et surtout pas aux besoins locaux dans leur diversité. Pour continuer sur la métaphore jardinière, ils conviennent bien aux grands arbres dont l’ombre profitent à tous, en revanche ils ne permettront pas d’arroser arbustes et fleurs, au soleil ou à l’ombre, plantes de sècheresse ou de sous-bois…

C’est pourquoi les fonds communautaires peuvent aussi être gérés de manière indirecte, via des circuits secondaires adaptés aux spécificités de terrain. Ce sont alors les autorités de gestion nationales ou infranationales qui définissent les embranchements et les formats des tuyaux qui permettront d’acheminer les fonds européens vers les projets et entreprises du territoire.

Les fonds de la politique régionale, tels que le FEDER, sont ainsi gérés suivant ce mode indirect. L’objectif du FEDER est justement d’assurer un développement territorial équilibré, dans ses différentes dimensions (une Europe plus intelligente, plus verte, plus connectée, plus sociale et plus proche des citoyens), mais cet objectif n’a de sens qu’au vu des spécificités du territoire considéré (région plus ou moins développée, plus ou moins industrielle, plus ou moins rurale…). En France, ce sont les régions qui sont les autorités de gestion et qui définissent, dans leurs programmes opérationnels, la manière dont elles vont allouer les fonds du FEDER aux projets et entreprises de la région. Autant de Régions, autant de programmes opérationnels et donc autant de circuits différents.

 

Mise en œuvre et intermédiation : le réseau capillaire

Enfin, au-delà de la gestion directe (les gros tuyaux) et de la gestion indirecte (les circuits secondaires), il convient de tenir compte des réseaux capillaires ou des pommeaux qui peuvent compléter… notre « système d’arrosage », pour continuer à filer notre métaphore ! La sélection des entreprises et des projets sur le terrain peut nécessiter en effet de recourir à des structures spécialisées, capables d’identifier les « bonnes » entreprises ou les « bons » projets au vu des objectifs communautaires et de définir la « bonne » manière d’intervenir. Ces structures, que ce soient des partenaires de mise en œuvre (le Groupe BEI au niveau européen ou le Groupe Caisse des Dépôts au niveau national) ou des intermédiaires (Banque Européenne d’Investissement, Caisse des Dépôts, banques, associations...), apportent leur expertise et leur connaissance du secteur ou du territoire pour réaliser une sélection adaptée des bénéficiaires des fonds communautaires, voire pour définir la manière d’intervenir auprès d’eux. C’est par exemple le cas avec la facilité « blending » du mécanisme d’interconnexion pour l’Europe, où l’analyse technique et financière faite par la Banque Européenne d’Investissement ou la Caisse des Dépôts sert à la Commission pour sélectionner les projets bénéficiaires.

 

Gros tuyaux, circuits secondaires, tuyaux capillaires et pommeaux… voilà en quelques mots la circuiterie – simple dans son principe, mais aux multiples ramifications en pratique – qui permet à l’argent européen d’irriguer l’ensemble du territoire européen et d’y faire fleurir les projets les plus variés !