cicéron
c'est poincarré
Avec sa voix toute fraîche et son ton décidé, Marie-Thérèse de la Taille porte bien ses 81 ans. Après ses études, comme la plupart des femmes de sa génération, elle fait le choix de rester à la maison pour élever ses enfants. Elle découvre sur le tard le métier de bibliothécaire par le biais d’une association qui la forme pour animer la bibliothèque d’un des quartiers défavorisés de sa ville.
« J’ai toujours aimé lire. C’est ma grand-mère qui m’a donné le goût de la lecture. Depuis 40 ans, grâce à la Bibliothèque pour tous, j’ai le plaisir de transmettre ce plaisir à mon tour. J’étais jeune lorsque j’ai commencé et maintenant, je suis la plus âgée de l’équipe… mais je suis encore rapide avec l’ordinateur ! En plus du travail de recherche des bons livres à proposer à nos lecteurs, j’assure une permanence de deux heures hebdomadaires.
On rencontre toutes sortes de gens à la bibliothèque : des personnes qui lisent, des gens qui ne savent pas quoi choisir, certains qui veulent des ouvrages intellectuels quand d’autres n’ont rien à prouver ! Je me souviens d’un professeur au Collège de France qui me disait « Trouvez-moi donc un bon policier ! ». C’est ce contact avec les autres que j’aime.
Je ne sais pas si les vieux intéressent les gens mais moi, les gens m’intéressent encore ! À travers leurs lectures, je découvre qui ils sont, ce qui les anime, ce qu’ils ont dans le cœur. Une bibliothèque, c’est un lieu particulier où on échange, où on se parle. Ce n’est pas virtuel : c’est une relation vraie. Parfois, les discussions avec nos lecteurs n’ont rien de littéraire : elles parlent de la vie, de ce qui va bien, de ce qui va moins bien, de ce qui les touche, les réjouit, les inquiète…
Parfois, quand je ne suis pas en forme, je suis tentée de ne pas faire ma permanence. Mais à mon âge, il faut s’obliger à bouger et continuer à être actif, à condition d’être vraiment utile ! ».