cicéron
c'est poincarré
Crédit Laurène Paucsik/Citadia
Au-delà du constat d’un dérèglement climatique qui bouleverse les écosystèmes et affecte nos conditions de vie, s’impose une urgence à agir. Car c’est un fait : il y a nécessité aujourd’hui d’adapter les modes de vie et d’aménager autrement en réponse à des changements globaux multiples qu’ils soient d’ordre environnementaux (intensification des risques climatiques, déclin de la biodiversité, dégradation de la qualité de vie et de la santé…), sociaux (changements des aspirations et du rapport à l’espace, mutation des besoins et modes d’habiter, augmentation de la population…), législatifs (logique ZAN, de renouvellement urbain, …) ou encore économiques et d’images (bilan d’opérations complexes, multiplication des acteurs, concurrence et positionnement marché, labellisation, …).
Au croisement de ces dynamiques, le département du Var, est particulièrement impacté par de fortes pressions environnementales (sécheresse, risque feu de forêt, appauvrissement des nappes et des cours d’eau…), sociales et touristiques (augmentation de la population, sur-fréquentation des milieux naturels, autres pollutions associées…) qui imposent aux acteurs locaux d’agir efficacement vers un aménagement plus durable de son territoire.
La complexité des enjeux et l’aspect multifactoriel des incidences impose d’adopter une approche « bioclimatique », réelle démarche de projet qui concerne tout autant la conception bâtimentaire, que l’échelle urbaine. Cela se traduit par une compréhension fine et une prise en compte globale de la géographie du site (patrimoine, géologie, climat…).
C’est cette vision de l’aménagement qui a guidé la conception de la ZAC des Laugiers à Solliès-Pont dans le Var : réel projet démonstrateur du fait de sa localisation et sa géographie (déprise agricole en lisière de centre-ville), son portage (public-privé), une implication forte des multiples acteurs (politiques/techniques/citoyens), ainsi que la volonté d’’intégration de référentiels environnementaux à plusieurs échelles dès le début du projet.
Face à un marché de l’immobilier en constante inflation, l'écoquartier a été conçu pour offrir des solutions de logements abordables tout en répondant à des normes élevées en matière de durabilité, de qualité de vie et de confort. Ces deux critères, souhaités dès le début du projet par la collectivité, ont été confortés par le choix stratégique du site du fait de sa proximité directe avec le centre ancien. En évitant un étalement urbain excessif, la commune tend ainsi à préserver et à revitaliser son centre-ville historique tout en développant une offre immobilière attractive et renouvelée.
L’approche « bioclimatique » tente de concilier deux objectifs principaux : se protéger des aléas climatiques (ressentis comme inconfortables), et tirer parti de ses bienfaits en trouvant l’équilibre nécessaire pour un confort d’usage qui soit acceptable tout en induisant le moins de consommation énergétique. Contextuels, les partis pris d’aménagements s’adaptent au site et aux conditions climatiques à l’échelle locale et micro locale et tirent parti de ses éléments naturels spécifiques (vent / exposition au soleil / implantations et hauteurs / trames paysagères / biodiversité locale). Pour ce faire, les études environnementales et de faisabilité doivent être réalisées de façon complémentaire.
Pour le quartier des Laugiers situé sur le pourtour méditerranéen, ces principes « bioclimatiques » se traduisent par la recherche d’un certain nombre d’objectifs :
Aux Laugiers la qualité environnementale a été guidée par un engagement dans des démarches de certifications environnementales à plusieurs échelles : à l’échelle urbaine, la commune a souhaité s’inscrire dans une certification Ecoquartier portée par la DDTM (Direction Départementale des Territoires et de la Mer) du Var. Elle a été complétée par la démarche “Quartier Durable Méditerranéen” (QDM), une approche régionale portée par l’association Envirobat BDM. A l’échelle des bâtiments il a été décidé de suivre une démarche Bâtiment Durable Méditerranéen (BDM) et de viser des labels E+C- (bâtiments à énergie positive et réduction de carbone). Cela inclut une conception contemporaine et résiliente qui s’inspire largement des grands principes bioclimatiques méditerranéens. Tous les partenaires impliqués dans le projet ont intégré ces démarches environnementales (certifications environnementales appliquées aux îlots opérationnels et prescriptions détaillées fournies par le cahier des charges au sein de la ZAC pour les espaces verts et les constructeurs de maisons individuelles).
La labellisation joue ainsi un double rôle d’aide à la décision, décision et, de cadrage, ainsi que et de justification des choix environnementaux.
En continuité de la question des certifications, la phase chantier est tout aussi capitale car elle soulève deux enjeux majeurs :
La démarche adoptée pour la réalisation de ce projet s'inscrit dans une perspective à long terme. Cela signifie que l'approche est conçue pour évoluer sur une période étendue, avec une attention particulière portée à l'implication des habitants et du public.
En effet, un projet urbain bioclimatique bien conçu et bien réalisé ne suffit pas toujours pour faire de lui un espace intégré à son territoire, vécu et bien habité par ses habitants. Les dispositifs bioclimatiques mis en place, appliqués autrefois de manière systématique dans l’habitat, représentent aujourd’hui souvent de nouvelles habitudes de vie et d’usage qui nécessitent une étape d’accompagnement afin qu’ils soient exploités à leur juste valeur. Aux Laugiers, cet accompagnement en phase « usage » est réalisé par les AMO QE de la ZAC et se traduit par des visites de logements et du quartier, la distribution d’un guide répertoriant les équipements spécifiques à leur logement et les éco-gestes à adopter, d’une brochure spécifique sur le confort d’été (gestion des protections solaires), par la mise en place d’affiche de sensibilisation dans les parties communes et de partage de questionnaires pour recenser le retour des usagers.
Cette nouvelle façon d’habiter, qui fait appel à des pratiques anciennes, peut s’illustrer comme un frein à la mise en œuvre d’une démarche bioclimatique pérenne. Les procédés constructifs sont là, les savoir-faire également. Seulement l’usage final ne peut être dissocié de tout cela car depuis toujours, l’architecture a eu pour ambition de créer des espaces qui soient adaptés à ses occupants, leurs modes de vie et leurs usages. Aujourd’hui, il semble nécessaire de repenser ce rapport qu’entretien l’Homme à l’espace sous le prisme des enjeux environnementaux. Ce changement de paradigme nécessite de concevoir différemment et donc de « réapprendre à habiter » ces lieux conçus pour optimiser les caractéristiques de son environnement.