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Crédit ©Peter/Adode Stock
La France, première destination touristique mondiale durable d’ici 2030 ?
C’est l’objectif du plan Destination France dévoilé en novembre dernier par Jean Castex. Un plan de reconquête et de transformation ambitieux qui vise à redynamiser le tourisme tricolore touché de plein fouet par la pandémie. Le plan prévoit 1,9 Md€ de moyens supplémentaires, dont 1,25 Md€ de prêts de la Banque des Territoire et de Bpifrance, et 650 M€ de financements de l'État. Il s’agit non seulement de conforter la place de l’hexagone au 1er rang des destinations touristiques mondiales mais au-delà, d’inventer un modèle plus durable et résilient.
Dans ce contexte, comment intégrer le numérique dans les stratégies touristiques pour répondre à ces enjeux de transformation et promouvoir la destination France ? Décryptage
Secteur stratégique par excellence, le tourisme représentait, avant la pandémie de Covid-19, 7,4% du PIB français et 9,5% des emplois. Classée jusqu’ici au 1er rang des destinations touristiques en nombre de visiteurs internationaux, la France occupe le 3e rang des destinations en termes de chiffre d’affaires généré, derrière les Etats-Unis et l’Espagne (source OCDE). Mais cette suprématie est mise à mal par la concurrence internationale qui s’intensifie et la crise sanitaire.
Cette dernière a accéléré des difficultés structurelles et amplifié des tendances de fond déjà à l'œuvre. Les enjeux auquels entend répondre le plan de reconquête et de transformation du tourisme français sont multiples : il s’agit non seulement de remédier à la pénurie de main-d’œuvre en structurant un réseau d’excellence, de mettre en valeur les atouts touristiques de nos territoires mais aussi de favoriser le slow-tourisme, d’’investir dans les infrastructures touristiques durables, de réduire l’empreinte écologique ou encore d’accélérer la transformation numérique du secteur. « Le numérique est aujourd’hui au cœur du tourisme », avait ainsi déclaré Emmanuel Macron, lors du lancement du plan Destination France en juin 2021.
Il est loin, très loin en effet le temps où pour organiser un séjour vers telle ou telle destination, il fallait se rendre physiquement dans une agence de voyage. En à peine une décennie, la révolution digitale a changé la donne. Place désormais à internet et aux plateformes qui, telles Airbnb, Abritel, Booking et Tripadvisor se taillent la part du lion en matière de réservation touristique.
Et si l’on ne voyage plus comme avant, c’est que les habitudes et aspirations des touristes ont considérablement évolué, à commencer par la manière de préparer et d’organiser un séjour. Pour qui sait surfer sur le web, trouver l’inspiration pour ses prochaines vacances ou se renseigner sur une destination est un jeu d’enfant. Depuis son ordinateur ou son smartphone, quelques clics suffisent pour lancer une recherche, accéder à des offres comparatives, lire des récits de voyage, se projeter en consultant les photos d’autres voyageurs ou confronter les avis pour éclairer son choix.
Autre signe des temps : le tourisme de masse n’a plus la cote. Ce sont désormais les destinations alternatives, les hébergements atypiques, la personnalisation ou encore la recherche « d’expériences uniques » qui ont le vent en poupe. Et dans ce domaine, les plateformes et l’utilisation du big data s’avèrent particulièrement utiles et efficaces pour cibler les offres et les clients.
La pandémie a également rebattu les cartes en matière de comportements et de géographie touristique. Il n’est plus aussi facile de s’envoler au bout du monde. Un point positif cependant : faute d’exotisme, les Français ont découvert ou redécouvert le charme et les nombreux atouts de notre pays. On assiste ainsi à une véritable « re-territorialisation » du tourisme, une aubaine pour nos régions.
Ces éléments combinés entre eux constituent pour les territoires et les acteurs locaux de la filière touristique française une véritable opportunité pour gagner en visibilité, regagner en attractivité et exploiter à plein leur potentiel touristique et économique.
Depuis une dizaine d’année, de nombreuses collectivités ont déjà jeté les premières bases de leur révolution numérique dans le champ du tourisme. Si la plupart ont concentré leurs efforts sur le développement d’outils et d’applications, elles sont désormais plus nombreuses à observer une stratégie digitale plus large, s’appuyant notamment sur le recueil et l’exploitation systématiques des données comme l’atteste le développement croissant des observatoires touristiques dépendant des Comités Régionaux de Tourisme (CRT) ou des Agences Départementales de Tourisme (ADT). Il existe par ailleurs des bases de données brutes relatives aux activités touristiques accessibles gratuitement aux professionnels du secteur à l'instar du site datatourisme.gouv.fr.
Cette analyse fine des datas a pour objectif d’éclairer et d’orienter la politique de développement touristique du territoire. Elle permet non seulement de mieux appréhender les attentes des touristes, leurs préférences d’achat, leur provenance, la durée de leur séjour, … - et in fine de développer des offres « sur-mesure » et différenciantes telles que l’agro tourisme ou le tourisme sportif - mais aussi de mieux gérer les flux touristiques à l’échelle du territoire.
Pour parachever leur « arsenal » numérique, en complément des dépliants des mairies et Offices de tourisme, quelques territoires se sont lancés dans le développement de plateformes et d’application dédiées. Ces dernières visent à améliorer le « parcours client » en lui offrant la possibilité de trouver sur un seul et même site toutes les informations dont il a besoin, de l’offre d’hébergement aux différentes activités possibles sur le territoire en passant par les services, les tarifs, les périodes d’affluence, … jusqu’à la finalisation de sa réservation.
Certaines plateformes vont même plus loin, en proposant à leurs clients des activités et des offres 100% personnalisées à travers la connaissance qu’elles ont de leurs profils, ou encore des formules « all inclusive ».
Mais développer une plateforme nécessite des compétences et engendre des coûts qui ne sont pas à la portée de tous les territoires. Par ailleurs, de nombreux professionnels se sont laissés tenter par l’aventure mais sans réel succès.
Alentour, la nouvelle plateforme lancée le 30 septembre 2021 par le gouvernement français accompagné par la Banque des Territoires souhaite relever le défi.
"Nous nous sommes pris en pleine figure il y a quinze ans la révolution Tripadvisor, puis il y a dix ans Booking.com et ensuite Airbnb... Il serait bon que l'innovation digitale vienne de temps en temps de la France, premier pays touristique au monde", avait alors déclaré à l’AFP Olivier Sichel, directeur de la Banque des Territoires et directeur général adjoint de la Caisse des Dépôts.
Face à cette concurrence internationale, Alentour propose un service de réservation numérique qui devrait permettre de dynamiser le tourisme en France en captant davantage de touristes français mais aussi étrangers. Elle « connecte les professionnels des activités de loisirs avec des hôtels, campings, gîtes, auberges, chambres d’hôtes, et les institutionnels du tourisme pour que les visiteurs puissent réserver instantanément une offre d’activités locale riche et variée » peut-on lire sur la page d’accueil de la plateforme.
Son potentiel est énorme. Car de fait, si l’hôtellerie et le transport sont des domaines dont les services de réservation sont déjà très digitalisés – respectivement à 80% et 70% - seulement 5% des réservations des activités passe par le canal digital.
Privilégiant l’ergonomie, la simplicité de distribution et de réservation, le catalogue numérique d’Alentour centralise les activités de plein air et nautique, de nature, de détente mais aussi toutes celles culturelles ou gastronomiques à proximité des hôtels, gîtes et campings de la région. Ainsi, en scannant un QR code dans l'un des lieux d'accueil du territoire ou à l’aide d’un sms cliquable, les voyageurs pourront recevoir des informations sur les loisirs disponibles dans la région via une carte interactive.
Par ailleurs, cette plateforme s'inscrit dans la tendance du slow-tourisme et du tourisme durable : tourné vers la quête d'expérience, elle veut favoriser l'économie locale et la protection de l'environnement.
D'abord expérimentée sur la Côte d'Azur, ses contenus sont encore peu étoffés, mais les services de la plateforme ont vocation à s’enrichir et à être progressivement déployés en 2022 sur l'ensemble du territoire.