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09 sep. 2024

Un maillage dense, condition de l’usage des transports en commun

La voiture est le mode de transport principal des Français. Dans l’enquête Conditions de vie et aspirations de septembre 2023, 65% des Français utilisent l’automobile pour se rendre sur leur lieu de travail ou d’étude et 74% de la population pour leurs autres trajets locaux (courses, loisirs, accompagnement enfants…). De nombreux travaux s’accordent sur le poids significatif que fait peser la dépendance à la voiture sur l’empreinte carbone de la France. La présente étude vise à identifier certains des leviers de report modal de l'automobile vers les transports en commun.

Moins d’un automobiliste sur cinq est réfractaire aux transports en commun

Au sein de ceux qui utilisent la voiture comme mode de transport principal (pour se rendre à leur travail ou sur leur lieu d’études ou pour leurs loisirs), près de quatre sur dix (39% exactement) n’ont pas de transport en commun à proximité de leur domicile, c’est-à-dire à moins de 600 mètres ou moins de 10 minutes à pied. C'est particulièrement le cas des automobilistes vivant en zone rurale.

43% de ceux qui prennent en général leur voiture pour se déplacer ont un arrêt de transport en commun près de chez eux et seraient potentiellement ouverts à abandonner leur voiture pour les utiliser, à certaines conditions. Parmi les leviers au changement, figure en première place la gratuité : 28% des automobilistes réguliers seraient prêts à basculer sur les transports en commun si ceux-ci étaient sans coût. La gratuité séduit plus particulièrement les 25-39 ans, les habitants d'agglomération moyenne (entre 20 et 100 000 habitants) et lorsque les automobilistes ont des trajets domicile travail inférieur à 5 km. Le levier de la gratuité se révèle toutefois plus faible que ce qu'on aurait pu attendre.

18% mentionnent ensuite une plus grande fiabilité des transports en commun (des transports à l’heure, et moins de suppression), 17% seraient sensibles à une plus grande rapidité des transports en commun.

Une plus grande fiabilité permettrait d'attirer davantage les diplômés du supérieur, les actifs occupés. De même la rapidité est évoquée plus volontiers par les diplômés du supérieur, et les hauts revenus.

Certains publics (19% des automobilistes) se montrent, en première lecture, réticents à abandonner la voiture pour aller vers les transports collectifs, alors même qu'ils ont, à proximité, au moins un arrêt de transports en commun. Aucune des pistes proposées ne les séduit et ils indiquent que "ils ne peuvent pas ou ne souhaitent pas utiliser davantage les transports en commun à la place de leur voiture". Mais une analyse plus approfondie de leurs réponses révèle qu'en réalité, des obstacles bien réels les en dissuadent le plus souvent. Le premier frein qui décourage les "réticents" à opter pour les transports en commun est leur fréquence insuffisante, ou des horaires qui ne correspondent pas à leurs horaires de travail (tôt le matin, tard le soir)(36% des cas). Deuxième obstacle à l'usage des transports en commun : ceux-ci ne sont pas toujours adaptés à un état de santé plus fragile. En effet on repère davantage de "réticents" chez les personnes âgées de 70 ans et plus (29%), et les personnes en situation de handicap ou de maladie chronique (26%).

Autrement dit, dans près d'un cas sur deux, il y a bien une offre de transport en commun à proximité de chez eux mais celle-ci n'est pas adapté à leurs besoins. 

De multiples freins sont ensuite évoqués de manière marginale (complexité, insécurité, manque de confort, cout trop important, manque de fiabilité). Au final seuls 17% des "réticents" évoquent un effet "d'habitude". Et l'on remarquera que, pour ces publics réticents, comme en moyenne, le prix n'est pas réellement un frein (seuls 3% des réticents évoquent des transports en commun trop cher, 5% des automobilistes).

En rapprochant la densité du maillage des transports en commun (à partir de la base Arrêts de transport en France - Données (csv) ouvertes - National (data.gouv.fr) ) des réponses des enquêtés, on constate qu'il existe vraisemblablement un effet de seuil au-delà duquel le report modal pourrait être plus massif. Ce n'est que dans les communes vraiment très bien dotées en transports en commun, que des mesures comme la gratuité, une plus grande rapidité ou fiabilité pourraient convaincre une large partie des automobilistes de laisser leur voiture au garage. En deçà, ces mesures d'amélioration des transports collectifs ont un peu moins d'effet.

Là où le potentiel de bascule de la voiture vers les transports collectifs est le plus élevé c'est donc en priorité dans l'agglomération parisienne ou dans les grandes agglomérations, où le réseau est déjà assez développé.

Conclusion

La voiture reste aujourd'hui encore le mode de transport principal des Français, notamment dans les zones périurbaines sous-dotées en transport en commun. Toutefois il n'y a pas de fatalité à cela et une majorité d'automobilistes seraient prêts à utiliser des transports collectifs. L'étude met en évidence pour cela la nécessité d'un maillage très dense, avec des effets de seuil. La rapidité, la fréquence et la fiabilité sont trois autres leviers puissants à l'usage des transports collectifs, juste après la gratuité qui n'est finalement que peu citée comme frein aux usages, en première intention.