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La SFEC, qu’est-ce c’est ?

La Stratégie française sur l’énergie et le climat (SFEC) a été publiée en avril 2020. Cette feuille de route nationale a pour objet de tracer le chemin pour atteindre la neutralité carbone en 2050 et adapter la société aux conséquences du changement climatique. Elle doit notamment mettre en cohérence :

  • la première loi de programmation sur l'énergie et le climat (LPEC) prévue pour 2023,
  • la 3e édition de la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC), adoptée pour la première fois en 2015, et révisée en 2018-2019,
  • la 3e édition de la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE 2024-2033)
  • et la 3e édition du Plan national d'adaptation au changement climatique (PNACC).

La SNBC, la PPE et le PNACC devront en effet être mis à jour pour prendre en compte les objectifs de la LPEC dans un délai d’un an suivant son adoption.

C’est l’occasion ou jamais de mettre en place une meilleure coordination entre les objectifs nationaux et régionaux énergie-climat pour atteindre la neutralité carbone.

 

Que contient la SFEC ? Quelles implications pour les territoires 

Concrètement, la SFEC est composée de quatre éléments qui peuvent paraître éloignés des préoccupations opérationnelles des collectivités. Décryptage de ce que contient cette SFEC et de ses implications pour  les territoires.

  • Loi de programmation sur l'énergie et le climat (LPEC) : les objectifs et les actions prioritaires

Introduite par la loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, la loi de programmation quinquennale devra fixer, à partir de 2023, les priorités d’action de la politique climatique et énergétique nationale en tenant compte de l’objectif européen de réduction des émissions nettes de gaz à effet de serre de -55% d’ici 2030.

Ses grands axes seront déclinés à travers la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) et la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE).

  • Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) : la feuille de route vers la neutralité carbone

La SNBC est la feuille de route pour lutter contre le changement climatique. Elle donne les orientations stratégiques pour mettre en œuvre, dans tous les secteurs d’activité, la transition vers une économie bas-carbone et atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050, c’est-à-dire un parfait équilibre entre les émissions et les absorptions de gaz à effet de serre.  Pour cela, elle fixe des recommandations à court-moyen termes de plafonds d'émissions de gaz à effet de serre : les budgets carbone.

Les collectivités territoriales ont un rôle majeur à jouer pour l’atteinte des objectifs de la neutralité carbone de la France à 2050, inscrits dans la SNBC. Du fait de leur patrimoine et de leurs compétences, elles doivent porter de nombreux investissements climat, mettre en place des stratégies et plans d’actions, et déployer les actions d’animation des acteurs de leur territoire.

  • Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) : l’outil de pilotage de la transition énergétique

La PPE est un des outils  de pilotage de la politique énergétique française. Elle fixe tous les 5 ans, par des objectifs quantitatifs, les orientations et priorités d’action des pouvoirs publics pour la gestion de l’ensemble des formes d’énergie sur le territoire métropolitain continental, afin de respecter les engagements de la politique énergétique.

Elle contient des volets relatifs à la sécurité d'approvisionnement, à l’efficacité énergétique, au développement des énergies renouvelables et de récupération, aux réseaux, au stockage des énergies, au développement de la mobilité propre, au pouvoir d’achat des consommateurs, aux compétences professionnelles nécessaires dans le domaine de l’énergie (et à l’adaptation des formations à ces besoins) et à la compétitivité des prix de l’énergie.

La PPE concerne donc directement un grand nombre d’aspects liés à l’action publique locale, à différentes échelles (régions, EPCI, communes, etc.), comme par exemple l’installation d’énergies renouvelables territorialisées, la mise à disposition de véhicules propres, etc.

  • Plan national d'adaptation au changement climatique (PNACC)

Le PNACC a pour objectifs de présenter un certain nombre de mesures concrètes et opérationnelles afin que la France incorpore l’adaptation au changement climatique dans l’ensemble de ses politiques publiques.

Le PNACC-2 avait été organisé selon six domaines d’action qui en structuraient les priorités :

  1. Gouvernance : articulation efficace des échelons nationaux et territoriaux ;
  2. Connaissance et information : sensibilisation de toute la population à la nécessité de lutter contre le changement climatique et de s’y adapter ;
  3. Prévention et résilience : protection des personnes et des biens face aux risques climatiques
  4. Filières économiques : préparation des filières économiques aux changements attendus (potentiel de création d’emplois et d’innovation) ;
  5. Nature et milieux : encouragement partout où cela est possible des solutions fondées sur la nature ;
  6. International : lien avec les expériences menées dans les autres pays et renforcement de la solidarité internationale sur l’adaptation.

Les collectivités territoriales sont particulièrement concernées par le domaine “Gouvernance” qui doit tenir compte des compétences exercées par les différents échelons territoriaux, par exemple la mise en œuvre du volet adaptation des Plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET).

 

Calendrier des travaux

La toute première Loi de programmation de l’énergie et du climat (LPEC) doit être adoptée d’ici juillet 2023. La SNBC et la PPE devront être mises à jour pour mettre en œuvre les orientations de cette loi dans un délai d’un an suivant son adoption, soit avant juillet 2024. Pour renforcer l’articulation entre les politiques d’atténuation et d’adaptation au changement climatique, le Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC) sera intégré dans ce processus.

 

Source : Ministère de la Transition écologique « Consultation du public sur la future Stratégie française sur l’énergie et le climat »

La co-construction : un processus très (trop?) élaboré

Afin que cette SFEC soit élaborée en concertation avec la population, une première consultation publique volontaire s’est tenue du 2 novembre 2021 au 15 février 2022, permettant à la fois de recueillir les avis du public et de contribuer à la sensibilisation du plus grand nombre de personnes aux enjeux vastes qui sont abordés.

Parallèlement, une structure de co-construction complexe a été mise en place en octobre 2021, et est toujours en cours. Pilotée par le ministère de la Transition écologique et sa direction générale de l’énergie et du climat, en lien étroit avec les autres ministères, elle a pour objectif d’associer les parties prenantes aux différents travaux techniques, par le biais de groupes de travail (GT) spécifiques :

  • 5 GT sectoriels pour la SNBC : bâtiments, transports, industrie-déchets, agriculture, forêts-sols-biomasse.
  • 6 GT transversaux pour la SNBC : collectivités territoriales, économie, empreinte carbone, numérique, outre-mer, dynamiques sociales.
  • 37 ateliers techniques pour la PPE : touchant les sujets du gaz renouvelable, de la géothermie, de la biomasse, de l’hydrogène, des réseaux électriques, du nucléaire, de la sécurité d’approvisionnement, du mix énergétique, de la fiscalité énergétique, etc.
  • 2 ateliers sur l’adaptation pour le PNACC : température (3 GT ont eu lieu) et collectivités (gouvernance, planification, accompagnement, socle d’actions et rapportage)

Le CLER-Réseau pour la transition énergétique s’y investit autant que possible, au même titre que d’autres organisations actives sur les sujets de la transition énergétique (le Réseau Action Climat, HESPUL, Solagro, les associations d’élus et de collectivités…).

La territorialisation : un effort d’articulation complexe

Le sujet sur lequel nous nous attardons spécifiquement est la territorialisation de la SFEC pour aboutir à une planification locale cohérente des objectifs nationaux. Selon l’ADEME, l’analyse globale des résultats des Régions montre que les politiques régionales sur le climat gardent des marges de progression. Les Schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) compilés des régions ne permettent pas l'atteinte des objectifs de la SNBC. Par ailleurs, si l’on cumule les trajectoires régionales construites à partir des objectifs issus des SRADDET et qu’on les compare à la trajectoire de la SNBC2, il ressort que la somme des émissions de GES des régions à horizon 2050 est presque 2 fois supérieure à l’objectif national.

L’enjeu principal de cette territorialisation réside donc dans le fait de contribuer à une meilleure articulation entre les efforts des institutions, de l’Etat et des collectivités locales en lien avec les citoyens et acteurs économiques.

Cette démarche louable et nécessaire met de l’avant la complexité :

  • de l’articulation entre les différents enjeux,
  • de l’articulation avec les instances existantes,
  • et de l’articulation entre les besoins des différentes parties prenantes concernées.

 

Lire également le billet dans lequel nous aborderons les besoins et questionnements des différents échelons de collectivités en lien avec cette feuille de route :  Une stratégie nationale, des échelons territoriaux aux besoins et enjeux divers, et le suivantDe la bonne gouvernance de la transition écologique!, qui s’attarde sur le processus de consultation de la SFEC et le modèle de gouvernance que nécessiteraient les enjeux qu’elle intègre.