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Crédit Source : Even Conseil
La biodiversité mondiale est confrontée à un défi majeur, avec 28% des espèces existantes ou connues considérées comme menacées, et les experts craignent que la moitié d'entre elles ne disparaissent d'ici un siècle, à un rythme de disparition 100 à 1000 fois supérieur au taux naturel d'extinction. Cette situation est alarmante car la biodiversité fournit des biens indispensables à la vie humaine.
Dans ce contexte, les phénomènes naturels extrêmes liés à la crise climatique et à l'urbanisation croissante mettent en évidence l'urgence d'intégrer la nature dans nos environnements urbains. L'Espace Nature Départemental du Plan, qui connaissait autrefois un déclin, illustre une transformation exemplaire. Ce projet aborde des enjeux de biodiversité et de sensibilisation, revêtant une importance cruciale dans un contexte où la préservation des écosystèmes est primordiale.
La renaturation : quesako ?
La renaturation est un processus porté par l’Homme visant à redynamiser et à réorienter un site dégradé vers son fonctionnement naturel, c’est-à-dire les processus écologiques, les cycles naturels, et les interactions entre les éléments du site, y compris la flore, la faune, et le sol. Il s’agit de restaurer le bon état écologique des sites à travers des opérations d’aménagement, de gestion des espaces et de sensibilisation des usagers. La renaturation des espaces dégradés s’appuie sur des données historiques, pédologiques, écologiques et géologiques.
Les opérations de renaturation peuvent prendre différentes formes :
Exemple d’opération de renaturation : ici réouverture du ru du petit Croult à Sarcelles (95) – Source : SIAH Croult et Petit Rosne
Les opérations de renaturation sont souvent mutualisées avec des aménagements visant à faire connaitre le site au grand public, et à sensibiliser les visiteurs au patrimoine naturel local, pour le connaitre et le respecter.
L'Espace Nature Départemental du Plan, situé au croisement de trois entités paysagères Varoises et à cheval sur les communes de la Garde et du Pradet, constitue aujourd’hui un grand réservoir de biodiversité. Par le passé, les activités agricoles et l’abandon des pratiques ancestrales ont participé à l’accélération de la dégradation de ce milieu, au détriment de la faune et de la flore. Des usages non désirés sont également venus s’implanter sur cet espace laissé à l’abandon (construction d’habitats légers sans autorisation ; déchetterie sauvage ; etc.)
C’est dans ce contexte que dès les années 1990, le Département du Var a identifié une opportunité de concevoir et de revalorisation ce site naturel en cours de déclin. Identifiée comme l’une des dernières zones humides côtières de Méditerranée, cet espace est classé en Espace Naturel Sensible (ENS), et également en Zone Naturelle d’Intérêt Faunistique et Floristique (ZNIEFF) de type II. Le Département a pris l’initiative d’acquérir ces terrains, via une procédure de DUP permettant de démontrer l’intérêt public majeur de ce projet. En une trentaine d’années, le site du Plan de la Garde est donc passé de friche au potentiel écologique important mais non valorisée, à véritable réservoir de biodiversité.
Les projets d’aménagement se doivent d’intégrer des mesures d’évitement, de réduction voir de compensation (ERC) afin de prévoir et de limiter leurs impacts sur l’environnement. Malgré cette phase de travail, menée principalement au sein de l’étude d’impact, il est difficile de prévoir l’ensemble des enjeux auquel le projet devra faire face durant sa réalisation.
Les défis écologiques survenus pendant la conception du projet doivent être considérés comme une opportunité précieuse pour une prise en compte plus approfondie des enjeux environnementaux à long terme. Dans le cas présent, un l'incendie accidentel, associé au passage d'un train, ayant entraîné la destruction de la litière végétale et la levée de dormance d'une espèce protégée, la Jacinthe de Rome, a mis en lumière l'importance de mener des études écologiques approfondies et d'être préparé à des événements imprévus. Malgré les retards et les complications administratives engendrés, notamment la nécessité d'obtenir des dérogations pour atteinte temporaire à des espèces protégées, ces contraintes ont conduit à une meilleure compréhension de la biodiversité locale et des écosystèmes fragiles. Cette prise de conscience a conduit à renforcer les mesures de protection environnementale et le suivi du projet.
De plus, ce genre d’obstacle peut servir de catalyseur, renforçant alors la collaboration entre les autorités locales, les experts en environnement, les associations, etc., favorisant une approche plus holistique de la renaturation.
En somme, les contraintes rencontrées ont été un moteur pour une meilleure intégration des enjeux environnementaux dans le projet, contribuant à sa durabilité à long terme et à son succès en tant qu'exemple inspirant de gestion responsable et réfléchie.
Cet espace rare dans la région, du fait des contraintes géographiques (entre la Méditerranée et le massif des Monts Toulonnais) et de l’urbanisation croissante, a fait l’objet de plusieurs scénarios avec différents gradients environnementaux dans le projet. Des expertises écologiques en amont ont permis d’identifier le fonctionnement précis de cet espace, aux dynamiques hydrauliques et écologiques mêlées et complexes. Les études techniques doivent permettre d’identifier les atouts et les faiblesses du site, en étant prévues le plus tôt possible lors de la réflexion du projet.
Dans le cas présent, le choix du scénario s’est porté sur la création d’un espace de nature pouvant accueillir tout public, dans le but d’offrir des espaces de respiration aux citadins et de sensibiliser les visiteurs au patrimoine écologique local et à la préservation de la biodiversité. Le parc constitue également un lieu de détente et récréatif pour toute la famille (par exemple à travers les jardins familiaux qui ont été conservés), qui permet d’allier aménagements écologiques et pédagogiques. Tout un travail d’insertion paysagère, et de compatibilité écologique a été mené pendant plusieurs années. De plus, un travail important sur la gestion hydraulique a été mené pour garantir l’état humide du site, avec la mise en place d'un réseau de bassin permettant d’alimenter les différentes zones humides du site tout en limitant leurs expansions trop importantes en cas de crue.
A gauche les jardins familiaux en cœur du site / A droite les jardins thématiques – Source : Even Conseil
Les atouts finaux de l'Espace Nature Départemental du Plan de la Garde, du fait de sa situation à proximité des zones urbaines, sont nombreux et jouent un rôle essentiel dans la vie des habitants. Ce vaste espace naturel offre aux riverains une opportunité de se ressourcer et de profiter de la nature, surtout pendant la pandémie de Covid-19 où il est devenu l'un des rares espaces ouverts. En plus d’être un espace de balade, les projets de renaturation nécessitent d’intégrer une notion pédagogique afin de sensibiliser les visiteurs à la préservation de ces milieux. Doté d'espaces de jeux, de sentiers de promenades et de découvertes, le parc permet aux visiteurs d'explorer différents habitats naturels, tout en participant à des activités pédagogiques et ludiques axées sur la biodiversité. Les parcours balisés et les jardins thématiques favorisent une expérience immersive tout en préservant la faune et la flore locales. De plus, le projet est venu accueillir la Maison Départementale de la Nature, qui propose régulièrement des expositions, des conférences et des activités artistiques, contribuant ainsi au rayonnement culturel du territoire. En évoluant au fil des saisons, le Plan de la Garde témoigne de la richesse de son environnement naturel et de son succès en tant qu'exemple de gestion responsable et durable.
Plan de l’Espace Nature Départemental du Plan de la Garde – Source : Ville de la Garde
A gauche un bassin permettant d’observer la faune et la flore d’une zone humide / A droite un poste d’observation pour identifier les différentes strates géologiques – photographies Even Conseil
En transformant un espace dégradé en un vaste réservoir de biodiversité, le projet de renaturation du Plan de la Garde offre un exemple inspirant de gestion responsable, démontrant la réussite d'une démarche réfléchie et durable. Les processus de renaturation, tels que celui du Plan de la Garde, revêtent une importance cruciale pour préserver les écosystèmes naturels et sensibiliser les différentes générations aux enjeux environnementaux. Ces espaces renaturés, proches des zones urbaines, ne sont pas seulement des refuges pour la biodiversité ou de gestion des crues, mais aussi des catalyseurs de liens entre l'homme et la nature, démontrant que la coexistence harmonieuse entre présence de l’Homme et préservation de l'environnement est une réalité envisageable. Ainsi, le projet illustre de manière tangible un exemple de solution fondée sur la nature, visant à préserver les milieux naturels et la biodiversité associée de manière pérenne, améliorer la gestion des crues et protéger les espaces urbanisés de certaines inondations, et fournir un lieu de rencontre multigénérationnel en offrant des espaces de détente, de loisirs, et d'éducation environnementale.