cicéron
c'est poincarré
Crédit photo granary - adobe stock
Alors, avant toutes choses, une plateforme numérique, qu’est-ce que c’est ?
On peut en première approche définir une plateforme comme un intermédiaire de confiance mettant en relation un ou des offreurs et des utilisateurs de services et de solutions.
En d’autres termes, la plateforme désigne tout lieu d'échanges où se rencontrent l'offre et la demande de façon dématérialisée.
Ebay est très certainement l’exemple historique le plus parlant : si les petites annonces existaient depuis des décennies, la numérisation de ce principe a permis de réduire à quasiment zéro les coûts de mise en relation et de transaction, le tout à l’échelle mondiale (ce qui explique le succès de Ebay et également de PayPal, le service de paiement qui lui était associé).
On peut également en donner une définition un peu plus complète sous l’angle économique en disant que les plateformes mettent en jeu des modèles économiques créant de la valeur en facilitant les échanges et les interactions au sein d’un ensemble cohérent de parties prenantes (une chaîne de valeur, une filière, une communauté d’intérêt, etc.) et en mettant à disposition de ces acteurs des services via une infrastructure digitale.
Ce qui est très caractéristique des plateformes et qu’il faut retenir, c’est que le modèle de plateforme vise à créer de la valeur à partir d’un écosystème alors que les modèles économiques plus traditionnels se déploient de manière plus « linéaire ».
Regardons ensemble comment cela se traduit dans ces deux modèles bien différents.
En résumé, dans un modèle classique, la valeur est apportée par l’entreprise. Plus précisément, la valeur ajoutée se trouve dans ce qui fait la différence dans le produit ou la solution offerte. Apple utilise ce modèle pour vendre ses Mac, iPhones, iPads, Apple watchs etc.
En résumé, dans un modèle d’affaire de plateforme, la valeur est apportée par des partenaires extérieurs et l’avantage compétitif se trouve dans le contrôle de l’écosystème. Ainsi, Amadeus regroupe l'ensemble de l'offre de ventes de billets d'avion, toutes compagnies aériennes partenaires confondues, et la propose aux agences de voyages, aux particuliers, etc.
Dans le même ordre d’idée, UberEats est une plateforme qui propose de livrer les plats de plusieurs restaurants. UberEats n’a pas de cuisine mais utilise celles des restaurants avec qui il est associé.
Apple, qu’on a déjà vu dans le modèle précédent, utilise également ce modèle pour iTunes, iMusic, Appstore, etc. Ainsi les deux modèles, modèle classique de « pipeline » et modèle « plateforme » peuvent converger en se complétant mutuellement.
On assiste aujourd’hui à une véritable « plateformisation » de l’économie et de notre société.
Personne ne contestera la domination des plateformes numériques sur les différents aspects de notre quotidien :
La puissance des plateformes réside dans leur capacité à très rapidement structurer de vastes écosystèmes avec d’innombrables intervenants autour d’offres et de processus permettant de fluidifier la mise en relation, la transaction et la « délivrance » d’un service. L’industrie lourde avait été révolutionnée naguère par l’organisation scientifique du travail – le Fordisme - , l’industrie des services est révolutionnée par l’organisation algorithmique des marchés (Uber, Deliveroo…) via les plateformes.
Quelque part, les plateformes représentent une forme extrêmement aboutie du capitalisme, avec des marchés qui s’auto-organisent en s’appuyant sur les outils numériques, et où les plateformes numériques apparaissent à la fois comme des « usines » (un lieu où se concentre la main d’œuvre) et des gigantesques supermarchés du XXIe siècle (un lieu où se rencontrent l’offre et la demande).
Même l’administration s’est plateformisée avec le portail Services-Public et celui sur l’État Plateforme. Et la Caisse des Dépôts n’échappe pas à cette tendance. Elle a par exemple lancé une plateforme pour le « Compte Personnel de Formation » pour le compte de l’Etat. Elle a également lancé l’espace personnalisé des employeurs publics sous la forme de la plateforme Employeur Public (PEP’S)
La Caisse des Dépôts est en outre engagée dans une démarche de plateformisation de son offre, notamment à destination des acteurs territoriaux, avec banquedesterritoires.fr
Une plateforme construit son modèle d’affaires en travaillant sur plusieurs choses : le choix d’un type de plateforme, un modèle de revenus et la mise en avant de ce qui fait sa « valeur » et qui peut être :
Avant d’ouvrir un service s’appuyant sur une plateforme, il faut bien s’assurer que la correspondance entre l’offre et la demande atteigne un certain niveau. C’est ce qu’on appelle le « network effect », ou effet réseau en français. Ainsi une plateforme de VTC, par exemple, ne lancera pas son service dans une ville sans s’assurer qu’il y ait suffisamment de voitures et suffisamment de clients.
La valeur des plateformes se fait par le trafic et donc par ce fameux effet réseau.
Différents types de plateformes ont vu le jour et se sont développées en fonction des besoins de leurs communautés d’utilisateurs.
Citons-en quelques-unes par catégorie :
Comme leur nom l’indique, ces plateformes facilitent les interactions (d’information, d’argent, etc.) entre leurs participants. Unilatérales, ces plateformes connectent des participants de même type.
Exemple : Facebook
Provenant souvent en partie ou totalement des utilisateurs, elles collectent du contenu d’un sous-ensemble d'utilisateurs et le partagent avec une large base d'utilisateurs de cette même plateforme.
Exemple : Youtube
Elles monétisent les données des utilisateurs à des tiers. L'accord pour fournir les données est une condition pour adhérer à la plateforme.
Exemple : Waze
Elles permettent de « relier » l'offre (qui fixe les prix) et la demande.
Exemple : Airbnb.
Pour avoir du succès ces plateformes doivent évoluer rapidement du marché de « niche » vers un marché plus large « grand public ».
Elles mettent en relation des propriétaires de points de distribution (ou « liens Internet ») avec des propriétaires de contenus souhaitant mettre à profit ces points de distribution pour distribuer leurs produits / solutions.
Exemple : Outbrain.
Plateforme spécialisée dans la recommandation de liens sponsorisés, Outbrain utilise via sa plateforme une technologie de recommandations personnalisées).
Dans ces plateformes, les services sont fournis par un réseau de fournisseurs indépendants.
Exemple : Uber
Elles sont ouvertes à la fois aux utilisateurs et aux développeurs d’applications.
Exemple : Android Market
Il faut un fort effet de réseau dans les deux sens (côté utilisateurs et côté développeurs) pour que cela fonctionne donc ces plateformes nécessitent une certaine « masse critique ».
Elles fournissent des briques logicielles utilisables dans des produits tiers. Ces plateformes sont unilatérales donc simples à lancer.
Exemple : Microsoft Azure
Ces plateformes mobilisent différents modèles. En voici quelques-uns :
Les modèles de revenus des plateformes sont divers :