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Suite à l’annonce, en mars 2023, des villes présélectionnées pour la Capitale européenne de la Culture en 2028, la candidature de Montpellier-Sète figure parmi les quatre finalistes avec Bourges, Clermont-Ferrand et Rouen.
Concurrencée essentiellement par des dossiers portés à l’échelle d’une ville-centre/agglomération, la candidature montpelliéraine tire sa singularité de la volonté d’élargir le périmètre d’action à un périmètre cohérent à l’échelle du quotidien. Car ce n’est pas uniquement Montpellier qui est actrice du projet mais bien une conurbation allant d’Alès à Sète passant par le Lido de Frontignan à Marseillan. Ce cordon littoral est complété par des territoires du Nord montpelliérain comme les Communautés de Communes de la Vallée de l’Hérault ou du Grand Pic-Saint-Loup. Ce sont près de 154 collectivités qui se retrouvent embarquées dans la course à l’accueil de l’évènement. Pour Michael Delafosse, maire de Montpellier et président de Montpellier Agglomération: « C’est une grande satisfaction ! C’est un challenge très difficile qui a fédéré 142 maires, des intercommunalités secteurs économiques, … jamais, des dans l’histoire de notre territoire nous n’avons été aussi unis […] ce qui nous a permis d’être sélectionné aujourd’hui, c’est ce formidable esprit de coopération. Quoi qu’il arrive, ce soufflé ne retombera pas ! [1] »
Figure 1
Cette candidature est le symbole de l’affirmation de la métropole comme lieu de toutes les cultures mais aussi un approfondissement d’une vision territoriale qui a pris du temps à se concrétiser. Celle d’étendre l’aire d’influence et de projets de Montpellier en faisant fi de limites administratives (politisées) tout en se rapprochant de logiques et dynamiques territoriales concrètes (celle des flux, des réseaux d’échanges et d’utilisation de l’espace). Car l’agglomération de Montpellier n’en est pas à un paradoxe près. Pêle-mêle, ni son aéroport, ni le Pic Saint Loup, ni les plages du Sud ne font aujourd’hui partie de celle-ci. Le tramway vers la mer qui trouve son terminus à une quinzaine de minutes à pied des plages en est le parfait exemple. Une frustration, certainement. Un dysfonctionnement, d’un point de vue de la cohérence des limites administratives, assumé par Michael Delafosse qui en a une idée bien claire, lui qui répond à la question, le périmètre de la Métropole de Montpellier a-t—il vocation à grandir ? par une réponse sans équivoque : « le président de la métropole répondra toujours oui »[2] .
À une autre échelle, l’objectif est de renouer le lien avec des villes d’équilibre, qui ont en été quelque sorte les victimes des arbitrages de l’ex région Occitanie et de la croissance rapide de Montpellier dite « la surdouée » à partir des années 1970/1980. La promesse n’est autre que de trouver un nouveau pacte territorial intégrateur au plus près des élus de son territoire mais bien au-delà de repenser les modes de coopération et de synergies à l’échelle du bassin de vie. Derrière l’idée de culture, cette candidature est pour les différentes parties prenantes : « surtout une opportunité de travailler des aménagements urbains essentiels, notamment en termes de mobilités pendulaires ferroviaires Sète-Montpellier-Nîmes et de rééquilibrer les territoires. Et si cette candidature permettait enfin de débloquer des projets vieux de plus de vingt ans ? [3] ». Le projet culturel est ici, un tremplin pour la mise en place d’un projet de territoire au sens opérationnel du terme.
Figure 2
La culture est utilisée comme un espace de projection politique territorialisée. La question qui se pose est de savoir si : c’est le système de gouvernance-gouvernement urbain qui construit des projets ou plutôt, comme ici, les projets qui permettent la construction d’une gouvernance urbaine interterritoriale ? Portant le sceau de la géographie, cette candidature n’est-elle pas un premier pas de séduction, d’échange et de meilleure compréhension de l’autre pour envisager des suites plus opérationnelles, notamment d’un point de vue urbain ? C'est ce qui ressort d’ailleurs des thématiques qui ont fait pencher la balance du jury en faveur de Montpellier, qui tournent autour de sujets relativement urbains : transition écologique, l’eau comme ressource, les mutations urbaines. Pour Michael Delafosse : « il faut travailler à plus large échelle les sujets de l’habitat, de la mobilité, cultiver ses complémentarités, construire du partenariat d’égal à égal. C’est un enjeu pour Montpellier qui ne peut pas supporter à elle seule toute la croissance démographique, après avoir tout aspiré au détriment des autres »[4] . Des projets sont mis en avant comme la requalification du centre-ville de Lunel ou la dépollution des friches de Frontignan. Avec Nîmes est mis en avant une synergie pour porter des projets internationaux entre les CHU et les facultés de médecine.
Ce processus permettrait de concrétiser d’un point de vue stratégique la notion de « ville en réseaux » (autour d’une gouvernance territoriale calquée sur un territoire vécu) et pourrait préfigurer, demain, la création d’une agence urbaine, véritable chimère (depuis plus d’une dizaine d’année), outil de coopération jamais concrétisée à l’échelle de l’aire urbaine et de l’arc Languedocien : Sète, Montpellier, Lunel, Alès, Nîmes. Cette dynamique de projet nous incite à regarder dans le rétroviseur et prend les traits de la communauté urbaine tant souhaitée par Georges Frêche en 2005. Organisation territoriale, objectivée en 2012, par Bernardo Secchi et Paola Vigano au sein de la démarche prospective : Montpellier 2040 qui ont vu en Montpellier une ville « diffuse », qui doit assumer pleinement son rôle métropolitain par la co-construction d’une gouvernance multipolaire avec des villes comme Sète. Sète, son port est un des exemples de lieu de convergence territoriale, qui ne peut rester isolé de son plus proche hinterland. Le parallèle avec Athènes y est tentant : Sète, demain, le Pirée de Montpellier ?
Verdict en fin d’année.
Notes
[1] Propos recueillis par Thierry Jougla pour l’article de Midi Libre du 03 Mars 2023 [consultable en ligne] : « Montpellier, finaliste pour être capitale de la culture 2028 : "Quand le rideau se lève, cette ville brille !"
[2] Propos recueillis par Florence Jaroniak et Christiane Wanaverbercq pour l’article du Moniteur du 7 juillet 2022 [consultable en ligne] : « Envisager l’habitat et la mobilité à grande échelle», Michaël Delafosse, maire de Montpellier et président de Montpellier Méditerranée Métropole
[3] Propos recueillis par Emilie Bec pour l’article du Midi Libre du 20 Novembre 2022 [consultable en ligne] : « Capitale européenne de la culture 2028 : Sète, l'atout singulier de Montpellier pour l'emporter »
[4] Propos recueillis par Florence Jaroniak et Christiane Wanaverbercq pour l’article du Moniteur du 7 juillet 2022 [consultable en ligne] : « Envisager l’habitat et la mobilité à grande échelle», Michaël Delafosse, maire de Montpellier et président de Montpellier Méditerranée Métropole